Début juin dans la commune de Ndondol, le RECODEF a convié ses partenaires des 12 communes à une foire de semences paysannes. L’objectif a travers cette activité est de permettre aux acteurs de pouvoir échanger leurs semences, mais également de retrouver certaines semences en voie de disparition. La foire a été visitée par le sous-préfet de la commune de NGoye avec la participation de la coordination nationale et de la mairie de ladite localité.
A Ndondol, ils étaient nombreux, début juin, les paysans qui sont venus exposer leurs semences paysannes. A la place publique de la commune, des tentes sont installées et des semences paysannes : mil, de maïs, sorgho, oseille, sorgho, millet, arachide, etc. sont bien rangées sur des étals. Sur chaque variété semencière, toutes les informations y figurent : le nom de la variété, son cycle, le taux de germination, etc. Les visiteurs s’empressent de se l’arracher. C’est le cas de Ousmane Sène venu de Ndangalma. Ce producteur a acheté des semences de mil variété Souna qu’il veut cultiver cette année. D’autres producteurs venus des autres contrées se sont eux aussi procurés des semences.
Selon le coordonnateur de Regroupement Communautaire pour l’auto Développement des Familles (RECODEF), initiateur de cette activité, ‘’cette foire paysanne constitue une occasion de réunir les paysans qui sont dans nos communes d’intervention afin qu’ils puissent échanger leurs semences’’. Selon Sara Diouf, de plus en plus des semences de qualité sont perdues. Une perte liée parfois à une mauvaise conservation, à la non adaptation ou bien aux effets des changements climatiques. ‘’Dès lors cette foire permet de faire le recensement des variétés de semences qui existent dans les communes. Une fois ce travail effectué, nous avons organisé cette foire que nous comptons pérenniser pour permettre aux producteurs de pouvoir faire des échanges. Aujourd’hui cette journée est bien inscrite au calendrier de nos activités et nous comptons la pérenniser’’, a expliqué M. Diouf. Son ambition est d’organiser une foire tournante pour mieux vulgariser cette activité qui, à ses yeux, est une stratégie pour retrouver les semences qui sont en voie de disparition.
Selon M. Ndiaye, le premier maillon de la chaine alimentaire c’est la semence paysanne qu’il définit comme étant une semence qui n’a pas été certifiée et ni achetée à un semencier. Elle a été semée par un cultivateur et prélevé dans sa production pour en faire un semis ultérieurement’’. Aussi et pour lui, la tenue de cette foire est d’autant importante qu’elle permet non seulement de retrouver les semences qui sont en voie de disparition mais aussi de favoriser les échanges d’expériences entre acteurs. Dans sa présentation, M. Ndiaye a soutenu que les premières semences paysannes ont été produites en Afrique plus précisément dans la vallée du Nil (en Egypte). Ainsi se dit d’avis que les paysans se doivent d’être jaloux de leurs semences parce qu’ils sont menacées par les multinationales semencières. ‘’Toutes les semences que l’on trouve sur le marché national comme international proviennent de la semence paysanne. Les multinationales les ont prises puis les ont améliorées pour les remettre sur le marché.’’, se désole-t-il. Laquelle amélioration ne débouche malheureusement que sur des semences hybrides qui ne sont que le produit d’une manipulation génétique, les OGM, organismes génétiquement modifiés. En d’autres termes, des semences pas naturelles du tout et qui ne peuvent être utilisées qu’une seule fois. Le spécialiste en semences paysannes de se dire convaincu que la semence paysanne demeure la voie de souveraineté. « Quand un paysan perd sa semence, il devient vulnérable. En 80 ans, nous avons perdu 75% de nos semences’’, a indiqué M. Ndiaye qui cite la FAO. Pour simplement dire, poursuit-il que la foire constitue un excellent cadre pour retrouver certaines semences. Il recommande à cet effet aux paysans de produire leurs propres semences et de bien les conserver. Aussi propose-t-il aux paysans les lieux indiqués dans leurs champs pour le prélèvement de leurs semences.
Le spécialiste n’a pas aussi manqué d’évoquer la baisse des rendements qui est en grande partie liée à la pauvreté des sols. Pour lui, cette situation n’est que la conséquence de l’utilisation abusive des engrais chimiques de synthèse par les adeptes de l’agriculture conventionnelle. Lesquels produits chimiques sont aussi pour beaucoup dans la pollution de la nappe phréatique. Ces pratiques entrainent à la longue la pauvreté des sols. ‘’La production de mil peut atteindre 500 à 800 kg par ha. Si vous y mettez des engrais chimiques vous pouvez atteindre trois tonnes à l’ha. Mais cette hausse n’est pas sans effet sur notre santé et sur l’environnement’’, a-t-il expliqué. Aussi recommande-t-il aux paysans de se tourner résolument vers une agriculture saine soucieuse de l’environnement et qui s’inscrit dans la durabilité.
Quant au coordinateur national d’ADC, il abonde dans le même sens. ‘’Le premier intrant demeure les semences. Elles doivent être protégées, sinon les producteurs vont éternellement dépendre des multinationales semencières’’, a soutenu M. Djibril Thiam. Et de poursuivre ‘’la foire qui nous réunit est une stratégie très importante dans le programme d’Action de Carême. L’agriculture occupe une place de choix dans le Programme pays. Dès lors cette foire des semences paysannes est d’une importance capitale pour nous. C’est le lieu aussi de remercier le RECODEF qui l’a initié. Surtout qu’il s’agit d’une stratégie qui permet aux producteurs de pouvoir protéger leurs semences mais également de les échanger entre eux’’. M. Thiam a également insisté sur le consommer local. ‘’Je suggère aux producteurs de consommer ce qu’ils produisent. Le consommer local est, de toute évidence, l’une des voix qui mènent à la souveraineté alimentaire. Nous devons répondre à l’appel du Chef de l’Etat qui demande à la population de consommer ce qu’elle cultive’’, a-t-il rappelé avant de suggérer au RECODEF d’œuvrer en toute intelligence avec les politiques étatiques allant dans ce sens.
Ababacar GUEYE