Maraîchage urbain
Penda Diafouné, productrice maraîchère à Thiès None : l’accès à la terre plombe
l’activité
Pratiquer l’agriculture urbaine dans la ville de Thiès est pratiquement la croix et la
bannière. A Thiès-None dans la cité du rail, Mme Penda Diafouné parvient à
exercer, tant bien que mal, le maraichage urbain sur un lopin de terre qu’on lui a
prêté. Dans cette espace, elle y a planté toute sorte de plantes maraichères (laitue,
salade, choux, oignons, etc.). Malgré les opportunités, son activité est menacée
par le foncier voire la restitution des parcelles aux propriétaires.
A Thiès None, un quartier périphérique de la ville de Thiès, trouver une parcelle nue pour
pratiquer le maraichage relève du parcours d’un combattant. Mme Penda Diafouné a su
user de son argumentaire pour pouvoir convaincre les propriétaires de parcelles nues
pour lui prêter une parcelle de 300 mètres carrés afin de pouvoir exercer le maraichage.
Prouesse qu’elle a réussie, en effet, elle a pu transformer cette parcelle en un véritable
poumon vert au cœur de son quartier.
Non loin de chez elle, la parcelle attire à première vue. En effet, les bananeraies, les
papayers, les citronniers longent la clôture. Dedans, des plants de salade, de navet,
d’aubergine et d’oignon ornent le décor. L’odeur des menthes chatouillent le nez des
visiteurs. Dans cette parcelle, Penda y a consenti toutes ses forces pour arriver à ce
stade. De corpulence moyenne, Penda la quarantaine révolue est très active. En cette fin
août, tôt le matin, elle et son fils ainé arrosent les plants, enlèvent les mauvaises herbes
et récoltent du chou, de la papaye, de la menthe pour la commercialisation.
Ses habits trempés de sueur, Penda miîtrise les techniques de cultures maraichères.
Elle a troqué son métier de relais communautaire qu’elle a exercé pendant 10 ans pour
pratiquer son métier de cœur, le maraichage. ‘’Avant d’épouser le maraichage, j’étais
alphabétisatrice en langue wolof (l’une des langues nationales la plus parlée au
Sénégal). Pour des raisons familiales, j’ai tout abandonné pour m’occuper des enfants.
Tout de même, cela ne m’a pas empêché d’intégrer les groupements de femmes. Et de
fil en aiguille, j’ai fait la connaissance de l’ONG AGRECOL/AFRIQUE, une des
organisations partenaires d’Action de Carême Suisse au Sénégal. AGRECOL/AFRIQUE
a réveillé ce qui dormait en moi à savoir l’agriculture, particulièrement le maraichage’’,
soutient-elle, le sourire aux lèvres.
Joviale et engagée dans ce secteur, Penda soutient que le maraichage fait partie de son
vécu parce que ses parents le pratiquaient. C’est seulement grâce à l’Ong
Agrecol/Afrique, qu’elle a véritablement pris conscience de ses potentialités dans ce
secteur. ‘’J’ai démarré avec le micro jardinage à la maison. Je semais de la salade, du
navet, de la carotte, des persils et des menthes. Au fil des années, l’activité se
développe, la demande était forte et je n’avais plus d’espace. C’est de là que j’ai sollicité
les propriétaires des parcelles non encore construites. Ils ont répondu favorablement,
Dieu merci je continue à mener mes activités. Pour combien de temps ? Je ne sais pas
encore’’, a laissé entendre Mme Diafouné. Une menace qui risque de plomber ses
activités.
En attendant, elle continue avec l’appui de son fils ainé agronome à développer leurs
activités. Aujourd’hui Penda parvient à payer la scolarité de ses enfants. ‘’La vente des
produits maraichers me permet aussi d’appuyer mon époux retraité sur certaines
charges familiales. Le maraichage a soulagé ma famille’’, a confié Mme Diafouné.
Aujourd’hui, avec l’appui de son fils, son travail consiste à faire le repiquage, le
désherbage et la commercialisation des produits. Certaines tâches qui demandent de la
force, sont dévolues aux enfants. D’ailleurs, les travaux ne sont plus fastidieux avec le
système goutte à goutte qu’ils ont installé. En termes d’investissement, elle fabrique son
compost avec les déchets ménagers comme les arrêts des poissons, la cendre, la paille,
etc.
Par ailleurs, le phénomène des changements climatiques a eu aussi des effets avec le
dérèglement du comportement végétatif dans les plants d’oignon qui ne sont pas arrivés
à maturité. Pareille pour la salade, où quelques pieds sont jaunâtres à cause de la forte
chaleur. Au-delà de ces contraintes, ‘’Pratiquer l’agriculture urbaine n’est pas chose
aisée. Le propriétaire de la parcelle peut à tout moment venir récupérer son bien et ce
sera un éternel recommencement. Il y a une épée de Damocles qui est suspendue sur
ma tête. Je ne dors que d’un seul œil’’, se désole Penda. A l’en croire, si elle ne
possède pas sa propre parcelle, son activité est toujours menacée. Et de rebondir ‘’le
maraichage en ville n’a pas de perspectives vue l’urbanisation galopante’’. Pour l’heure,
elle envisage de se déplacer vers le centre du pays où elle dispose d’un vaste terrain. En
attendant, Penda continue son activité avec abnégation et détermination pour porter le
maraichage urbain encore plus loin.
Ababacar GUEYE